Isaïe 6, 1-13

Le Seigneur vient

Saint Bernard

Premier Sermon de l’Avent, 2 et 8, SC 480, p. 99 et 111

 

          Frères, avec l’apôtre extasié et émerveillé, regardez, vous aussi, la grandeur de Celui qui s’avance. C’est bien Celui qui, au témoignage de Gabriel, est le Fils du Très-Haut, et donc, lui aussi, Très-Haut avec le Très-Haut. Cat il n’est pas permis de soupçonner le Fils de Dieu d’être inférieur à son Père, mais on doit le reconnaître d’égale élévation et de dignité absolument identique. Qui ne sait, en effet, que les fils des princes sont princes, eux aussi, et que les fils des rois sont eux-mêmes rois ?

          Cependant, pourquoi des trois personnes que nous croyons, confessons et adorons dans la Souveraine Trinité, n’est-ce ni le Père qui vient, ni le Saint-Esprit, mais le Fils ? Je ne peux absolument pas croire que cela soit sans raison. Mais, qui a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été son conseiller ? Car ce n’est pas sans une très profonde intention de la Trinité qu’il a été décidé que ce serait le Fils qui viendrait. Et si nous considérons la raison de notre exil, nous pourrons peut-être saisir, au moins partiellement, quelle convenance il y avait à ce que ce soit spécialement par le Fils que nous soyons libérés.

          Je voudrais savoir comment il se fait que ce soit lui, qui soit venu à nous, et non pas plutôt, nous, qui soyons venu à lui. Car c’est nous qui en avions besoin, et ce n’est pas l’habitude des riches d’aller chez les pauvres, même pour leur faire l’aumône. C’est vrai, frères : c’est plutôt nous qui aurions dû aller à lui. Mais deux obstacles nous en empêchaient : nos yeux étaient aveugles, et lui habite une lumière inaccessible ; de plus, nous étions étendus, paralysés, sur une civière, incapables d’accéder à sa hauteur divine. Voilà pourquoi le très bon Sauveur, le médecin des âmes est descendu de sa hauteur, et a aussi tamisé l’éclat de sa gloire par égard pour la faiblesse de nos yeux. Il s’est revêtu d’une sorte de lanterne, je veux parler de ce corps glorieux et parfaitement pur de toute souillure qu’il a assumé. Ce corps est, en effet, cette nuée légère et lumineuse sur laquelle, selon le prophète, il devait monter pour descendre en Egypte : Voici que Dieu, monté sur un léger nuage, vient en Egypte.