1 Maccabées 1, 41-61

« L’abomination de la désolation »

Père Fulcran Vigouroux

Article Abomination de la désolation, DB, tome I-A, p. 70

 

L’auteur du premier livre des Maccabées a reproduit dans son récit les expressions du prophète Daniel. Ce langage de l’écrivain sacré et les mots qu’il a choisis nous prouvent qu’il a reconnu dans la profanation du Temple de Jérusalem par Antiochus Epiphane l’accomplissement de la prophétie de Daniel. Dans quel sens a-t-il entendu ce passage de Daniel ? Il nous dit en premier lieu que, par les ordres d’Antiochus, on bâtit sur l’autel l’abomination de la désolation. Vraisemblablement une idole. Des commentateurs ont entendu ce mot dans le sens d’une statue représentant Jupiter Olympien, à qui, d’après le second livre des Maccabées (6,2), le Temple de Jérusalem avait été consacré. Cependant, il est difficile de justifier cette interprétation.

Le contexte démontre qu’il n’est pas question d’une statue, ou d’une idole, mais d’un autel idolâtrique, construit, bâti sur l’autel des holocaustes lequel est ainsi souillé et profané. Il est dit expressément qu’on bâtit l’abomination de la désolation, terme qui ne peut s’appliquer ni à une statue, ni à une colonne. Un peu plus loin, nous lisons : Le vingt-cinquième jour du mois, on sacrifiait sur l’autel qui était sur l’autel des holocaustes, ce qui montre bien que sur le grand autel des holocaustes, là où l’on offrait au vrai Dieu les sacrifices sanglants, on avait construit un autel plus petit, destiné au culte des faux dieux. 

L‘ensemble du récit et la suite des faits montrent que cette profanation du Temple du vrai Dieu par l’érection d’u autel sacrilège sur l’emplacement même où les enfants d’Aaron offraient les sacrifices prescrits par la loi, fut considéré comme une grande calamité nationale, en même temps que comme une injure sanglante au Dieu véritable et aux sentiments religieux de la nation juive. Ce ne fut que par une purification solennelle et par une nouvelle dédicace du Temple que l’on put réparer un si abominable outrage. La profanation de la maison de Dieu par les Romains au temps de Titus ne devait pas exciter plus tard une moindre horreur dans le cœur des Juifs.