Luc 10, 38-42

Marthe et Marie

Origène

Homélies sur saint Luc, Fragments grecs 72, SC 87, p. 521s

 

          On pourrait admettre avec vraisemblance que Marthe symbolise l’action, Marie la contemplation. Le mystère de la charité est ôté à la vie active si l’enseignement et l’exhortation morale n’ont pas pour but la contemplation : car l’action et la contemplation n’existent pas l’une sans l’autre. Il faut dire en outre que Marthe a reçu d’une manière plus corporelle le Logos (la Parole) dans sa propre maison, en son âme, tandis que Marie l’écoutait de façon spirituelle en se tenant à ses pieds ; ainsi dans le cas de Marie, on n’a plus affaire à l’enseignement d’introduction, qui est donné par pédagogie et que reçoit celui qui a détruit ce qu’il avait de puéril, mais ce n’est pas encore le moment de l’enseignement parfait.

          Marthe peut aussi représenter la Synagogue qui vient de la circoncision et a reçu Jésus dans ses propres frontières, accaparée par les nombreuses cérémonies qu’exige la lettre de la Loi. Marthe est l’Eglise venue des nations, qui a choisi la bonne part de la loi spirituelle, celle qui ne lui sera pas ôtée, qui ne sera pas détruite comme la gloire qui éclairait la face de Moïse ; elle a choisi dans la Loi les quelques points qui sont utiles et elle rapporte tout à l’unique commandement : Tu aimeras. Il faut interpréter les mots : Une seule chose est nécessaire, par : Tu aimeras ton prochain comme toi-même, et ceux-ci : Il est besoin de peu, par : Tu connais les commandements : tu ne feras pas d’adultère, tu ne tueras pas.

          Marthe peut encore représenter les fidèles venus de la circoncision qui pratiquent les coutumes juives, observant à la juive les préceptes de la Loi, Marie, ceux qui y ont renoncé, les Juifs dans le secret, assis seulement aux pieds de Jésus, cherchant les réalités d’en-haut, non celles de la terre ; en effet, en réfléchissant de différents points de vue, on trouvera Marthe trop corporelle, impliquée dans beaucoup d’affaires, tandis que Marie s’adonne seulement à la contemplation et aux choses spirituelles.