Hébreux 13, 1-25

Une allusion eucharistique

Père Pierre Grelot

Une lecture de l’épître aux Hébreux, p. 135s

 

          Le « Repas du Seigneur » qui désignait chez Paul la célébration eucharistique (1 Co 11,20), n’est pas nommé comme tel. Mais l’allusion à la table y fait clairement allusion, et cette table, c’est un autel. Dans la logique de ses développements précédents, l’auteur de la lettre la met en parallèle avec les repas sacrés du judaïsme, liés aux sacrifices d’animaux. C’est dans la logique du parallèle entre les sacrifices de la liturgie juive, rappelés ici par une allusion à celui du grand jour des Pardons où le grand prêtre entrait dans le sanctuaire avec le sang des victimes, et où les corps des animaux sacrifiés étaient brûlés « en dehors du camp », suivant la terminologie employée dans le Lévitique. Des allusions au sang des animaux appellent l’allusion au sang rédempteur de Jésus. Mais c’est par une allusion subtile que l’auteur rapproche le corps des victimes emportées en dehors du camp, comprenons du Temple de Jérusalem, et de la mort de Jésus qui s’est produite en dehors des portes de la ville sainte.

          Attachés au Christ Jésus, nous devons nous aussi sortir en dehors du camp, nous détacher de Jérusalem et de son Temple : ce n’est plus là qu’est notre lieu saint. Deux détails du verset 10 font entrevoir la façon dont l’auteur, sans le dire explicitement, comprend le repas eucharistique. Il ne le nomme pas comme tel. Mais l’allusion au verbe « manger » à la fin du verset, montre qu’il existe, dans la communauté, un rite comparable aux repas sacrés qui suivaient les sacrifices juifs : le repas auquel les fidèles participent ne peut être que le Repas du Seigneur mentionné par Paul (1 Co 11,20). Or, ce repas est regardé comme sacrificiel, d’après le rite auquel il est explicitement consacré.

          Cela renvoie au passage où l‘auteur déclarait que les réalités célestes doivent être purifiées par des sacrifices plus excellents que ceux d’autrefois. Il s’agissait de la mort du Christ qui versait son sang pour les péchés des hommes : elle a constitué le sacrifice de la nouvelle alliance et c’est par l’oblation de son corps que nous sommes sanctifiés. Il en résulte que l’autel est lié au repas auquel les desservants de la Tente n’ont pas le droit de manger. Cela renvoie implicitement à la façon dont les quatre récits de la dernière Cène présentent les paroles de Dieu : mon corps donné pour vous, mon sang versé pour vous. Il en résulte pour nous, les croyants, une manière de vivre qui doit être comprise comme un sacrifice de louange, présenté à Dieu par la médiation de Celui qui nous a sanctifiés par l’oblation de lui-même.