Romains 8, 5-27

Une théophanie muette, une Parole qui rassemble

Père Louis Barlet et Chantal Guillerlain

Le Beau Christ en Actes, p. 34s

 

          Présence de Dieu dans ce groupe réuni au Cénacle échos du Sinaï… Oui, mais sans que Dieu parle ! Il faut relever ce silence, parce que les théophanies sont généralement des lieux de parole de Dieu. Au Sinaï, Dieu avait prononcé dix Paroles ! Dans ces manifestations, la Parole de Dieu constituait l’essentiel de l’évènement.

            Or voici que Pentecôte n’honore pas cette théologie. Dieu s’y manifeste, mais en se taisant. Pas de voix céleste… Ce silence est remarquable. Mais tout aussi remarquables ces langues de feu, ces langues qui viennent du ciel. Langue connote parole. Et de fait la parole ne va pas manquer, mais sur les lèvres des disciples : Ils commencèrent à parler en d’autres langues. Que s’est-il donc passé ?

            C’est la parole qui rassemble ces hommes : Ils commencèrent à parler… Jamais ils n’avaient parlé ainsi. Quelle est donc cette parole ? Cherchons la réponse en regardant d’abord ce qu’elle fait : elle rassemble et elle fait communiquer.

            Dehors, c’est la Jérusalem des grands jours, surpeuplée de pèlerins, tous Juifs venus parfois de très loin ; c’est la loi qui les a rassemblés. Or voici que ce rassemblement se trouve dérouté : un autre appel est venu concurrencer celui de la Loi. Cette voix, c’est la parole des disciples. Voici donc que cette parole d’un nouvel Horeb convoque ces pèlerins, disciples de Moïse, et les rassemble ailleurs. Ailleurs, parce qu’à cette heure, leur réunion devait se faire au Temple : c’est l’heure du sacrifice du matin, ce que l’on apprend de Pierre lui-même : Ces gens ne sont pas ivres, car il n’est que 9 heures du matin.

            Ailleurs certes, et aussi autrement… La Loi les aurait rassemblés dans l’uniformité : elle a pris des hommes dans leur pays et les a fait venir ici. Elle veut les conduire au Temple, à une liturgie en hébreu. La voix, en revanche, les rassemble dans la diversité : Nous les entendons dans notre propre dialecte ! Quelle parole qui réunit et en même temps rapatrie ! Cette parole nouvelle fait l’effet d’un pays natal où chacun trouve son parler, sa culture, son identité, car la patrie d’un homme, c’est sa langue. Telle est donc cette Parole.

            Et que dit-elle ? On l’apprend des auditeurs : Nous les entendons dire dans nos langues les merveilles de Dieu. Dieu est merveilleux ! Au point que ces auditeurs sont remplis d’admiration devant Lui et de bonheur. Leur relation religieuse est en train de changer. La Parole des Douze est l’acteur principal de cette scène : elle rassemble des hommes venus de partout, elle rejoint chacun dans sa singularité, elle rapatrie comme si elle était son pays natal, elle renouvelle la relation de ces hommes avec Dieu… Quelle est cette Parole capable de faire tout cela ?