Osée 9, 1-14

La tristesse de l’absence de Dieu

Edmond Jacob

Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Commentaire de l’AT, XIa, p. 66s

 

                L’absence de Dieu se manifestera dans la fin de toutes les cérémonies  cultuelles dont le peuple est lui-même la cause ; et en poursuivant de leur hostilité le prophète, le peuple se prive de la seule issue de salut qui leur est donnée.

                   La joie est l’élément dominant du culte ; la joie n’apparaît pas dans le Pentateuque, ni dans l’ouvrage deutéronomiste. Osée ne veut pas dire qu’Israël ne doit pas se réjouir, mais qu’il ne pourra plus se réjouir, car sa joie, au lieu d’être celle du peuple de l’alliance, est devenue celle des nations.

                   En mentionnant les aires à blé, le prophète nous donne un détail sur le déroulement de leur culte ; l’importance de ces aires à blé comme lieu de culte apparaît déjà dans le livre des Juges et dans le second livre de Samuel. C’étaient des endroits plats, chose assez rare en Palestine, permettant par conséquent le rassemblement de grandes foules, et qui étaient propriété collective des habitants d’une cité. Mais il faut avant tout se souvenir que c’étaient des endroits où l’on battait le blé et que c’est probablement cette fonction-là qui a déterminé leur rôle cultuel. L’endroit où l’on battait le blé était le lieu où s’étalaient la vie et la fécondité ; c’est là qu’on se livrait à des lamentations sur le dieu perdu et retrouvé (Genèse 50,10), que l’on dansait dans l’espoir de voir dans la danse un renouveau de la sexualité (Juges 21,21). Il paraît à peu près certain que l’aire sur laquelle David projeta de construire le Temple, était déjà un lieu sacré (2 Samuel 24,18). Osée et tous les prophètes estimaient que puisque que Dieu s’était emparé de ces aires, il n’y avait aucune raison de ne pas lui rendre un culte à ces endroits, mais l’oubli de Dieu et de son histoire n’en laissait subsister que l’aspect naturiste.

                   A côté de l’aire, Osée mentionne la cuve : c’est une cuvette taillée dans le roc dans laquelle le fruit était écrasé ; on peut penser que, puisque le moût est mentionné à part, la cuve ici servait à presser les olives plutôt que le raisin. L’aire et la cuve sont personnifiées ; Osée ne voit à cela aucun inconvénient. Une fois démythisées, c’est-à-dire n’étant plus des dieux, mais des créatures de Dieu, elles peuvent devenir des personnes capables d’un véritable dialogue et même d’être des amis. Il est difficile de dire dans quelle mesure et à quelle époque ces pratiques, d’origine cananéenne avaient été pleinement intégrées par les Israélites. En tout cas, l’amitié entre l’homme et la nature ne sera parfaitement réalisée que dans l’avenir (Osée 2,23). L’aire et la cuve mentionnées ensemble comme le couronnement de la moisson apparaissent dans bien des livres bibliques (Deutéronome, Joël, Aggée, Proverbes, etc… Débarrassées de leur attache avec Dieu, ses « amis » deviennent trompeurs.