1 Thessaloniciens 2,13 – 3,13

Benoît d’Aniane

Dom Philibert Schmitz

Dictionnaire d’Histoire et de Géographie Ecclésiastique, tome 8, col. 183s

 

          Quand Benoît d’Aniane entreprit la réforme, la vie régulière n’existait presque plus dans les monastères, ce fait est constaté par tous les contemporains. Or, par son zèle inlassable, par ses démarches incessantes, par son exemple entraînant, par ses écrits enfin, il a réussi à ramener à la pratique de la vie bénédictine un grand nombre de monastères. Il y a fait refleurir la vie intérieure. Dans la mesure du possible, il a cherché à supprimer les abus venus de l’extérieur, sans toujours obtenir tout ce qu’il aurait voulu. On ne peut trop le louer d’une si belle œuvre : il a sauvé le monachisme bénédictin d’une langueur qui aurait pu devenir mortelle.

          Pour l’Abbé d’Aniane, le bénédictin est le moine qui vit dans une séparation complète d’avec le monde, uniquement consacrée à la prière et au travail. Certaines de ses ordonnances, celles particulièrement qui concernent la clôture ou les jours de jeûne, étaient plus strictes que ne le désirait saint Benoît de Nursie. Quant à la prière, à partir de saint Benoît d’Aniane, il se créa une tradition que l’Office était, non plus comme le veut l’Abbé du Mont-Cassin, l’action la plus importante en dignité dans le cadre de la vie monastique, mais presque l’unique occupation des moines… C’était rompre l’équilibre si bien établi par le législateur. Cette conception prévalut à Cluny et dans un grand nombre de monastères.

          Le plan de Benoît d’Aniane, qui visait à l’uniformité absolue en tout et partout jusque dans les moindres détails, n’a pas été accepté tel quel par l’Assemblée de 817 ; il n’a triomphé qu’en partie. Sa réforme disparut peu après lui. De l’œuvre de Benoît d’Aniane survécurent toutefois plusieurs éléments généraux : le besoin de décisions déclaratoires de la Règle, un ensemble de pratiques qui formèrent la base des coutumes monastiques pendant les siècles suivants, un développement de la liturgie qu’ignorait la simplicité primitive de la conception de Benoît de Nursie. Cluny surtout héritera de ces legs, car Cluny, par Bernon, son premier Abbé, était greffé sur Aniane ; par Cluny, c’est tout l’Occident monastique qui finira par se trouver tributaire d’Aniane. Ainsi, après le grand fondateur lui-même, Benoît de Nursie, personne plus que Benoît d’Aniane n’a influencé largement sur les destinées du monachisme en Occident.