Exode 10, 21 – 11,10

La dixième plaie : les ténèbres et l’annonce de la mort des premiers nés

Frank Michaeli

Le livre de l’Exode, p. 94s

 

          La dixième plaie est annoncée d’une manière solennelle parce que c’est Dieu qui frappera lui-même le Pays, et non plus Moïse ou Aaron, et parce que, cette fois, c’est la mort d’êtres vivants qui atteindra le peuple, depuis le Pharaon jusqu’à la dernière des servantes. Aucune plaie précédente n’avait entraîné directement la mort d’hommes, même s’ils n’avaient été parfois touchés dans leur corps ou dans leur santé. La gravité de la catastrophe viendra aussi du fait qu’il s’agira des premiers-nés, considérés comme les héritiers dans chaque famille, l’héritier du trône pour le Pharaon, et comme particulièrement consacrés à la divinité. Si le Pharaon ne laisse pas partir le peuple, son premier-né périra.

          Pour comprendre cette annonce et ce qui suivra, il faut se placer sur le plan théologique. Le combat est un combat de dieux, et il n’est pas impossible que, dans les grands cris dans tout le pays comme dans la préservation des premiers-nés des Hébreux, se trouvent quelques allusions à des croyances mythologiques égyptiennes qui voient dans chaque nuit un épisode du grand combat du soleil, incarné dans la personne du Pharaon, contre les puissances hostiles des ténèbres. Mais dans cette nuit tragique, le Pharaon ne vaincra pas comme chaque matin ; il sera vaincu par une puissance plus forte, celle du Dieu des Hébreux. Peut-être y a-t-il aussi, dans la tradition biblique, une perspective eschatologique qui voit, dans cette plaie et dans ce grand cri, mot au singulier dans le texte, l’illustration des événements qui se passeront à la fin des temps, au moment du jugement de Dieu et de sa victoire finale.

          Il faut ajouter qu’un nouveau thème apparaît : celui du dépouillement des Egyptiens par les Hébreux au moment de l’exode ; il reprend ce qui avait été dit dans le récit de la vocation de Moïse, mais en explique la raison par des motifs plus élevés : ce n’est pas véritablement un dépouillement, c’est le résultat d’une grâce que les Hébreux trouvent à leur égard, chez les Egyptiens, par la volonté de Dieu, surtout parce que Moïse était un homme très considéré par tous, même par les serviteurs de Pharaon.