Jean 13, 21…38

Le traître est démasqué

Hans-Josef Klauck

Judas, un disciple de Jésus, p. 94s

 

          Judas sortit immédiatement, il faisait nuit. La notation chronologique à la fin de cette péricope évangélique a une haute valeur symbolique. Elle couple la figure de Judas avec le dualisme de la lumière et des ténèbres qui court tout au long de la première moitié de l’évangile de Jean. Judas quitte le groupe des disciples.

          Il quitte le cercle lumineux autour de Jésus, lui qui est la lumière du monde en personne. Il pénètre dans le domaine des ténèbres pour coopérer à cette action dont parle déjà le Prologue de l’évangile de Jean (1,5) : Et la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point comprise. Pour Jésus, la nuit est imminente qui éteindra son existence terrestre (9,4), et qui rend nécessaire cette nouvelle forme de sa présence dans l’Esprit dont parlent les discours d’adieux qui suivent.

          Judas erre dans cette nuit dans laquelle, selon Jésus (11,10), on trébuche : Si quelqu’un marche de nuit, il trébuche parce que la lumière n’est pas en lui. La parole brève avec laquelle se termine le récit concernant le départ du traître recueille encore une fois toute l’obscurité de ces événements, une conclusion pleine de force, mais qui, pour l’évangéliste, devient seulement le fond obscur  d’où se détache la parole relative à la glorification de Jésus qui va suivre.

          Donnons la parole à Cyrillonas le Syrien (VI° siècle), plus pour la qualité poétique de son commentaire que pour la qualité théologique : Qui a jamais vu un festin inouï où le vautour a mangé avec les onze colombes ? Qui a jamais vu un festin aussi admirable auquel la taupe, le fils des ténèbres, a pris part en même temps que l’aigle ? Le soir venu, Judas quitte la salle du festin, et les disciples restèrent dans une paix profonde. La salle du festin s’est réjouie, car les ténèbres s’étaient éloignées des douze, et le bouc s’était enfui. Le hibou qui se glorifiait des ténèbres quitta les colombes et vola au-dehors, en croassant. Alors la demeure devint lumineuse, dans laquelle le soleil caché séjournait avec ses rayons ; elle se réjouit parce que la vipère maudite s’en était enfouie.