Nombres 24, 1-19

L’oracle de Balaam

Antoine Nouis

La Bible, commentaire intégral, Tome I, Le Pentateuque, p. 581s

 

          Après avoir annoncé la victoire d’Israël sur Moab, Balaam fait de même sur Amalec et les Caïnites. Puis Balaam retourne chez lui.

          Au moment de quitter le personnage de Balaam, on voit qu’il a finalement obéi au Seigneur en bénissant Israël au lieu de le maudire. Mais alors pourquoi garde-t-il une image aussi négative dans la tradition biblique ? Chaque fois qu’il est cité dans le Nouveau Testament, c’est pour souligner son dévoiement. La réponse à cette question se trouve dans la suite de l’histoire. Au chapitre 25 du livre des Nombres, les filles de Moab séduisent les fils d’Israël et les entraînent à la débauche. Elles sont tellement belles que les Hébreux succombent à leur charme et les suivent dans leur culte idolâtre. Ce que Balaam n’a pu faire, les belles Moabites l’ont réussi en prenant les hommes par leur point faible. Sauf que Balaam n’est pas innocent dans cette affaire, puisque c’est lui qui a indiqué ce stratagème au roi de Moab (31,16) !

          Cette hypocrisie est reprise dans le livre de l’Apocalypse (2,14) qui dit à propos de Balaam qu’il a enseigné à Balaq comment causer la chute des Israélites en les incitant à manger des viandes sacrifiées aux idoles et à se prostituer. Balaam n’a pas pu maudire Israël contre la volonté de Dieu, mais il a usé de perfidie pour répondre quand même à la demande du roi de Moab. On imagine qu’il a été récompensé par son conseil.

          La deuxième lettre de Pierre (2,15) fait de Balaam le maître des prophètes de mensonges, de ces hommes qui ont cultivé leur popularité et leur propre gloire plutôt que la vérité. Le prophète de mensonge est celui qui dit la parole qu’on attend de lui, car il préfère la notoriété à la justice. Parce qu’il s’est laissé séduire par l’argent et les honneurs qu’on lui proposait, Balaam a négocié avec Dieu. Ouvertement, il a fait semblant de bénir Israël, mais par derrière il s’est débrouillé pour satisfaire les attentes du roi qui le payait.

          Un verset de l’évangile de Luc (12,48) déclare : A quiconque il a beaucoup donné, il sera beaucoup demandé ; de celui à qui on a beaucoup confié, on exigera davantage. Parce qu’il a beaucoup reçu, Balaam aurait pu beaucoup apporter, mais il est passé à côté de sa vocation.