Jean 15, 1-8

La vigne et les sarments

Père Louis Bouyer

Le quatrième évangile, p. 203s

 

          Le symbole de la vigne était familier aux Juifs. L’Ancien Testament l’avait fréquemment employé pour désigner le peuple de Dieu et pour dépeindre les soins dont celui-ci l’entoure. Ici, en s’identifiant avec la vraie vigne, Jésus proclame que c’est en lui qu’est le véritable Israël et que seuls ceux qui sont attachés à lui en font partie. Les prophètes, par le terme de vigne, entendaient généralement désigner le vignoble ; en saint Jean, il n’est plus question que d’un cep unique : l’image s’est comme resserrée pour la révélation d’unité dans l’amour qu’elle doit transmettre.

          Quand Jésus dit : Je suis la vraie vigne, il s’agit d’une seule personne divine prolongeant son incarnation à partir de la tige qui est l’homme Jésus jusque dans ses branches, l’unité vivante du tout. C’est par Jésus seul que la vigne puise ses racines jusqu’au cœur de la Vie divine, c’est vraiment la vie de Dieu qui se répand jusqu’aux extrémités des sarments les plus éloignés. Elle est en Jésus comme dans sa source, mais la source ne jaillit que pour qu’on y puise. 

          Nous avons là une double affirmation sur les sarments. En dehors du Christ dans lequel ils doivent s’insérer organiquement, ils ne peuvent porter aucun fruit. Sous une autre forme, mais dans la même lumière eucharistique, c’est l’affirmation que le Christ avait déjà formulée : Si vous ne mangez pas ma chair, si vous ne buvez mon sang, vous n’avez pas la vie en vous.

          Les sarments, s’ils sont dans le Christ, doivent porter du fruit, sinon ils seront arrachés du cep. Uni au Christ, le fidèle, qui met en œuvre la grâce que cette unité vitale lui apporte, est purifié, émondé par Dieu pour que son fruit abonde toujours davantage ; celui, au contraire, qui se ferme à l’action vivifiante de la sève doit être retranché du cep et consumé. Les sarments du Christ doivent porter du fruit, sinon ils sont condamnés au feu ; mais le fruit qu’ils portent vient de leur appartenance au Christ : il est son fruit.

          Et quel est ce fruit ? Le fruit de l’unité organique du Christ et des siens, c’est leur union dans l’amour.