Actes 10, 1-33

Pierre a joppe

Père Marc Rastouin

Simon-Pierre dans le Nouveau Testament, p. 147s

 

          Que dire du récit par Pierre de sa vision ? Pierre prie. Nous connaissons l’importance de la prière chez Luc. Luc insiste qu’une extase lui vient, pas que Pierre a eu une vision : il veut insister sur l’initiative divine. En effet, Luc ne peut faire appel aux Ecritures pour justifier l’abandon des lois alimentaires. Il ne peut que faire appel à une intervention directe de Dieu dans la communauté. Comme Jésus à son baptême et Etienne lors de son martyr, Pierre voit le ciel ouvert. C’est dire l’importance de l’événement. On note le comme qui signale en quelque sorte l’impuissance du langage : comme une grande toile. La protestation de Pierre rappelle celle d’Ezéchiel où le prophète refuse également de consommer un aliment impur : Ma vie n’a jamais été souillée dans l’impureté, jamais je n’ai mangé d’aliment impur.

            Au cœur du texte se trouve une sentence qui vient de Dieu. On voit aussi que, derrière la question des animaux impurs ou pas, se trouve la question des hommes, des êtres humains : il s’agit en définitive de l’acceptation de tous les hommes dans l’alliance. Les interdits alimentaires jouent un rôle important dans la compréhension qu’Israël a de sa mission et de sa vie. D’ailleurs on ne peut qu’être frappé qu’à Jérusalem, les critiques ne disent pas : Quoi ? Comment ? Tu as baptisé des païens !, mais bien : Tu es entré chez des hommes incirconcis et tu as mangé avec eux ! On notera du coup l’importance d’un petit verset qui pourrait passer inaperçu. Avant même la rencontre de Pierre et de Corneille, il est dit : Pierre les fit alors entrer et leur donna l’hospitalité. Le lendemain, il se mit en route et partit avec eux ; quelques-uns des frères l’accompagnèrent. Pierre a déjà accepté de loger des non-juifs chez lui, ou plutôt chez son homonyme Simon le tanneur, lequel est certainement juif. D’une certaine manière, il a déjà fait tomber la barrière que l’Esprit va spectaculairement faire tomber peu après.

            Pierre cependant continue à réfléchir ; rien de moins que l’Esprit pour lui mettre les points sur les i, en lui disant : Voilà des hommes qui te cherchent. Va donc, descends et pars avec eux sans hésiter : c’est moi qui les ai envoyés. Que constate-t-on à plusieurs reprises dans les Actes ? L’Esprit Saint parle à Philippe, à Pierre, à l’Eglise, à Paul, à Agabus le prophète chrétien. Toujours, c’est l’Esprit qui appelle à aller de l’avant, à l’audace, à l’évangélisation. Ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit, ici, plus de la conversion de Pierre que de celle de Corneille ! Ce sont les convictions de Pierre qui font problème, pas celles de Corneille.