Jean 21, 1-14

« C’est le Seigneur »

Saint Pierre Chrysologue

Le Mystère de Pâques, Ichtus 10, Sermon 78, p. 269s

 

          Jésus leur dit : Jetez le filet à droite et vous trouverez. Les disciples ont jeté le filet à droite, ils l’ont jeté du côté viril, mais ils n’ont pas encore assez de force pour le tirer ; ils sentent pourtant, d’après le poids que les poissons ont obéi à l’appel de leur maître et que cette pêche n’est point due à la simple habileté d’un homme !

          Alors le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : c’est le Seigneur. Celui qui est aimé voit le premier, l’amour porte sur toutes choses un regard plus aigu, et celui qui aime sent toujours avec plus de vivacité. Quant Pierre eut entendu : quelle gêne rend l’esprit de Pierre si lent et l’empêche de reconnaître Jésus le premier, comme il l’avait déjà fait ? Quel est ce témoignage singulier qui lui faisait s’écrier : Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant !

          Quand il entendit que c’était le Seigneur, Pierre se ceignit de sa tunique, car il était nu. Que c’est étrange ! Lorsque le Seigneur est découvert, Pierre est surpris nu. C’est que la trahison avait dépouillé Pierre ! Que c’est étrange, Pierre se met nu dans la barque et se jette tout habillé à la mer ! L’innocence n’est jamais nue, le coupable se dissimule toujours sous un voile. Ainsi, tel Adam, Pierre aujourd’hui désire après sa faute cacher se nudité.

          Il se ceignit de sa tunique et se jeta à la mer. Il espérait que la mer laverait ce vêtement sordide qu’était la trahison. Il se jeta à la mer. Il voulait revenir le premier, lui qui avait été investi des plus hautes charges. Il se ceignit de sa tunique, car il devait se ceindre de l’agonie du martyre, selon les paroles du Seigneur : Un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas.

          Les autres disciples vinrent avec la barque, traînant le filet plein de poissons, car il n’était éloigné de la terre que d’environ deux cents coudées. Les autres vinrent avec la barque, en traînant leur filet plein de poissons. Ils ramènent avec eux, avec forces peines, l’Eglise jetée dans les vents du monde ; c’est elle que ces hommes emportent dans le filet de l’évangile, vers les clartés du ciel, et qu’ils arrachent aux abîmes, pour la conduire auprès du Seigneur.

          Ils n’étaient pas bien loin de la rive. Ils n’étaient plus éloignés de la terre des vivants ; l’abandon de leur présent les avait déjà rendus tout proches de leur futur. Que deux cents coudées environ. Par les Juifs et les païens, il double le nombre cent, en joignant la vie et le salut des deux peuples.