Ephésiens 4, 1-24

L’Ascension du Seigneur

Père Renaud Silly

Dictionnaire Jésus, p. 96s

 

          Si la mort n’a exercé sur Jésus qu’une puissance passagère, la Résurrection ne se réduit pas à une apologie tardive pour lui, qui rétablirait seulement la justice bafouée par son procès inique. La toute première génération chrétienne a surtout été frappée par la majesté avec laquelle Jésus lui est apparu vivant. Il bénit ses disciples comme un grand prêtre dans l’exercice de ses plus hautes fonctions. Il annonce à Marie-Madeleine qu’il monte vers son père pour y prendre la place du Maître. Matthieu rapporte la manifestation en gloire de Jésus à ses disciples sur une montagne de Galilée. Il y organise pour eux sa royauté sur le monde entier jusqu’à la fin des temps. Il affirme sa maîtrise des événements en fonction des desseins divins, d’une façon souveraine, en fort contraste avec les machinations des chefs politiques ou religieux qui ont cru diriger le cours des choses  durant la Passion ou après la Résurrection.

            Il s’assied à la droite du Père. Jésus a par ailleurs prophétisé l’Ascension : c’est un gain pour vous que je m’en aille. Les lettres de Paul font entendre l’écho d’hymnes très anciennes où la Résurrection apparaît surtout comme l’exaltation de Jésus à la droite de Dieu. Les épîtres catholiques ne sont pas en reste, comme celle aux Hébreux qui proclame Jésus entré dans le sanctuaire céleste, établi par Dieu prêtre souverain à la tête de toute sa maison. Quant à l’Apocalypse de Jean, elle est tout entière une vision de Jésus, Agneau de Dieu, siégeant sur le trône divin, portant glorieusement les marques de sa Passion. C’est encore dans cette session à la droite de Dieu, dans sa gloire qu’Etienne voit Jésus au moment de sa Passion.

            A l’instar des autres événements de la vie de Jésus, l’Ascension actualise certaines des dimensions de l’Apocalyptique juive. Jésus glorifié présente des ressemblances avec Métatron dont le nom signifie qu’il partage le trône divin. Ils ont tous deux un nom ésotérique en vingt-quatre lettres et un nom exotérique de six lettres. Ils sont l’un et l’autre exaltés au-dessus de toute la Création. Les figures de Jésus et de Métatron, du moins telles qu’elles sont été attestées dans les traditions anciennes, remontent vraisemblablement à une conception juive antérieure, qui donne à un ange le statut d’hypostase et de manifestation sensible de la divinité. Dans la version grecque des Proverbes de Salomon, la Sagesse à laquelle Jésus s’identifie parfois siège sur le trône divin pour signifier son identité avec Dieu. Toujours dans l’Alexandrie ptolémaïque, Ezéchiel le tragédien voit même Moïse s’avancer sur le trône divin ou Dieu lui tend son sceptre  pour le faire monter ; là-même, il le couronne.