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Vendredi de la 7ème semaine du Temps Pascal

Actes 87, 1-14

Pour une théologie de l’Esprit-Saint

Père René Coste

L’Evangile de l’Esprit, p. 29s

 

           Le mystère de la Personne de l’Esprit-Saint est ce qu’il y a de plus difficile à penser au sein du Mystère trinitaire. Le Père Congar cite opportunément cette confidence de saint Augustin : Sur le Père et le Fils, nombreux sont les livres écrits par des hommes savants et spirituels… Au contraire, l’Esprit-Saint n’a pas encore été étudié avec autant d’abondance et de soin par les doctes et grands commentateurs des divines Ecritures, de telle sorte qu’il soit aisé de comprendre également son caractère propre, qui fait que nous ne pouvons l’appeler ni Fils, ni Père, mais seulement Esprit-Saint.

          Nous n’avons plus à déplorer une telle pauvreté théologique. Nous bénéficions, depuis, de tant de travaux, dont la Trinité de saint Augustin lui-même, et de tant de témoignages de mystiques ! Toutefois, la difficulté de penser le mystère de la Troisième Personne demeure. C’est qu’il dépasse tellement les potentialités de compréhension de l’intelligence humaine qu’elle ne peut que balbutier à son sujet. Et, cependant, ce balbutiement peut se révéler un prodigieux accomplissement, car la nuit obscure de la foi est une lumière qui dépasse incomparablement celle de la simple raison. La vraie solution est celle qu’a imaginée saint Augustin lui-même : il a prié, il s’est mis à l’écoute de l’Esprit-Saint et il s’est consacré, pendant des années, à l’élaboration d’une théologie trinitaire qui reste l’une des grandes œuvres théologiques du Christianisme. La prière est fondamentale, car la lumière sur le mystère de Dieu ne peut venir que de Dieu lui-même. Elle doit être à la fois supplication fervente, ouverture et désir du cœur en profondeur, disponibilité et humble adhésion de tout notre être, suivant les poétiques expressions de la prière mystique de saint Siméon le Nouveau Théologien : invocation du Saint-Esprit par celui qui déjà le voit : Viens, lumière véritable. Viens, vie éternelle. Viens, mystère caché. Viens, trésor sans nom. Viens, réalité ineffable. Viens, personne inconcevable. Viens, toi qu’a désiré et désire mon âme misérable. Viens, toi le Seul, au seul, puisque tu le vois je suis seul. Viens, toi qui m’as séparé de tout et fais solitaire en ce monde. Viens mon souffle et ma vie. Viens, consolation de ma pauvre âme. Viens, ma joie, ma gloire, mon désir sans fin. Ce grand solitaire a été un témoin passionné de l’Esprit ; ses poèmes sont du feu.

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Jeudi de la 7ème semaine du Temps Pascal

Actes 27, 21-44

Je crois en l’Esprit-Saint

Cardinal Christoph Schönborn

Au cœur du message chrétien, Commentaire du catéchisme, p. 60s

 

          Pour être en contact avec le Christ, il faut d’abord avoir été touché par l’Esprit-Saint. C’est lui qui vient au-devant de nous et suscite en nous la foi (CEC 683). L’Esprit-Saint est l’âme de la vie chrétienne. De même que l’âme de l’homme n’est pas visible en elle-même, si ce n’est dans ses œuvres, l’Esprit-Saint reste caché, et pourtant on peut le  reconnaître aux qu’il forme en nous.

            L’Esprit-Saint n’est-il pas ce grand inconnu, même parmi nous, les chrétiens ? Pourtant, il est si important que le Christ peut dire : Il vaut mieux pour vous que je parte, car si je ne pars pas, le Paraclet Consolateur ne viendra pas à vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai (Jean 16,7). Et juste avant de retourner auprès du Père, Jésus dit encore à ses disciples qui lui demandent quand il va restaurer la royauté en Israël : Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit-Saint qui descendra sur vous, et vous serez mes témoins.

            Nous vivons au temps de l’Esprit-Saint. Il est pour nous ici-bas appelé auprès de nous le Consolateur qui reste toujours près de nous. Par Lui, le Christ est présent au milieu de nous, et par Lui, nous pouvons appeler Dieu : Abba, Père.

            L’action de l’Esprit-Saint agit en nous de plusieurs manières. En voici quelques unes : Il prépare à accueillir le Christ. Depuis le commencement de la création, Il est Celui qui insuffle la vie à toutes les créatures. Dans toute la longue histoire de l’Ancienne Alliance, Il prépare le peuple à la venue du Messie. Il est l’Esprit de l’attente du Messie, de l’Avent. Il ouvre le cœur des croyants pour leur rencontre avec le Christ.

            Il révèle aux hommes qui est le Christ : Nul ne peut appeler Jésus Seigneur sinon dans l’Esprit-Saint. L’Esprit-Saint nous donne la grâce de confesser que Jésus est le Fils du Dieu vivant. Il rappelle à l’Eglise tout ce que le Christ a dit : L’Esprit-Saint est la mémoire vivante de l’Eglise.

            L’Esprit-Saint fait fructifier le don de la communion dans l’Eglise. Comme l’Esprit-Saint est le lien d’amour qui unit le Père et le Fils, son action est de mettre en communion avec le Christ tous les membres de l’Eglise. L’Esprit-Saint est comme la sève de la vigne du Père, qui porte son fruit dans les sarments. Sans la grâce de l’Esprit-Saint, nous ne sommes pas capables de vivre en chrétiens. Il est le maître intérieur de la vie avec le Christ, doux hôte et ami qui inspire, conduit, rectifie et fortifie cette vie. Il est aussi le maître intérieur de la prière chrétienne, c’est pourquoi nous devons l’invoquer tous les jours avec ferveur : Viens, Esprit-Saint !

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Mercredi de la 7ème semaine du Temps Pascal – Mémoire de saint Pacôme

Actes 27, 1-20

La spiritualité pacômienne

Sœur Véronique

Initiation au monachisme des premiers siècles chrétiens, p. 82s

 

          L’Ecriture Sainte est au centre de la vie du moine qui doit l’apprendre par cœur afin de pouvoir la réciter au long de ses journées, et ceci dès son arrivée au monastère. Le moine doit s’efforcer de la comprendre et d’en faire l’inspiration de sa vie. Elle lui est constamment commentée par ses supérieurs hiérarchiques ; après avoir écouté leur catéchèse, il partage avec ses frères ce qu’il a retenu, puis il entre dans sa cellule pour la méditer. Les frères se réunissent matin et soir pour réciter, ou écouter un frère réciter la Parole de Dieu et s’en laisser imprégner. La petite lumière qui guide les frères, c’est l’Evangile, vérité divine.            Toute la vie du moine est contrée sur l’union à Dieu dans la prière. Cette union prend surtout la forme d’une récitation constante de l’Ecriture. Elle ne peut se réaliser sans renoncement à tout ce qui n’est pas Dieu : renoncement au péché, au monde, à la famille, à la volonté propre. Et tous ces renoncements constituent l’essence de la vie monastique pacômienne.

            L’important, pour Pacôme, ce n’est pas d’abord l’expérience sensible de Dieu par les sens spirituels, mais la foi et une vie conforme à l’Evangile. Ceci explique que l’on ne parle guère de contemplation dans la spiritualité pacômienne. Toute la vie du chrétien et celle du moine est un combat contre le péché qui, par la porte des sens, pénètre l’homme.

            On vient au monastère pour se convertir. Aucun pécheur ne se voit fermer la porte du monastère s’il est disposé à se convertir. Mais quiconque ne veut plus faire d’effort de conversion n’a plus de place dans la négligence. Pacôme considère l’âme comme un champ où tous les fruits de l’Esprit de Dieu ont été semés lors du baptême, et le démon est toujours à l’affût pour mettre ses fruits à la place. Même si le moine mène une vie d’extrême ascèse,  s’il se néglige sur un point, il ouvre la porte au démon qui a alors libre cours.

            Un seul cœur avec ton frère, dit Pacôme. Les frères doivent se considérer comme responsables et responsables de l’esprit de la communauté, sous la direction des supérieurs. On se sert les uns les autres dans d’humbles tâches. On se sert avec simplicité. Le partage des biens est intégral. Chacun reçoit selon ses besoins. La communion fraternelle se vit dans la prière se vit dans la prière, certes, mais aussi dans les biens matériels ; cela ne fait qu’un.

            En tout cela, vous trouvez la trace évidente d’une spiritualité monastique qui a fortement inspiré  saint Benoît.

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3° lecture Fête de saint Matthias

Jean 15, 9-17

« Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres »

Saint Augustin

Traité sur l’évangile de saint Jean, OC 10, p. 264s

 

          Lorsque le Seigneur Jésus dit : Voici mon commandement, comme s’il n’en existait point d’autres, devons-nous, frères, l’entendre dans ce sens qu’il ne nous a point donné d’autre commandement que celui de nous aimer les uns les autres ? N’y a-t-il point un commandement plus grand, celui d’aimer Dieu, ou bien dirons-nous que Dieu ne nous a donné d’autre commandement que celui de l’amour, en nous affranchissant de tous les autres ? L’apôtre Paul nous recommande trois choses : La foi, l’espérance, la charité demeurent maintenant, elles sont trois, mais la plus grande des trois, c’est la charité. Et quand même on renfermerait les deux premiers préceptes dans la charité, c’est-à-dire dans l’amour, la charité d’après l’apôtre est la plus grande, mais elle n’est pas la seule. Qui pourrait suffire à recueillir, à énumérer tous les commandements qui ont rapport à la foi ? Considérons ce que dit le même apôtre : La charité est la plénitude de la loi (Romains 13,10). Or, là où est la charité, quelle chose peut nous manquer ? Mais si la charité n’existe pas, quelle compensation peut nous rester ? Le démon croit, mais sans aimer (Jacques 2,19), cependant l’amour suppose nécessairement la foi. Celui qui n’aime point peut espérer, bien qu’inutilement, son pardon, mais ne peut désespérer s’il aime véritablement. L’amour suppose nécessairement avec lui la foi et l’espérance, comme l’amour du prochain suppose nécessairement l’amour de Dieu. Comment en effet celui qui n’aime point Dieu peut-il aimer son prochain comme lui-même, puisqu’il ne s’aime point lui-même ? Attachons-nous au commandement du Seigneur qui nous fait un devoir de nous aimer, et, par là, nous accomplirons tous ses autres commandements, car nous avons dans ce commandement tout ce que renferment les autres. Or cette charité est bien distincte de l’amour que les hommes ont les uns pour les autres en tant qu’ils sont hommes, et Notre Seigneur a pris soin d’établir cette distinction en ajoutant : Comme je vous ai aimés, car dans quel dessein Jésus-Christ nous a-t-il aimés, si ce n’est pour nous faire régner avec lui dans les cieux ? Aimons-nous donc les uns les autres pour le même motif, afin que notre amour nous sépare de ceux dont l’amour réciproque n’a point pour fin l’amour de Dieu, et qui, par là même, ne s’aiment pas véritablement. Ceux au contraire qui s’aiment mutuellement pour tendre d’un commun accord à la possession de Dieu, s’aiment d’un amour véritable. Qu’ils aiment donc Dieu pour s’aimer véritablement les uns les autres afin que Dieu soit tout en tous.

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2° lecture Fête de saint Matthias

Actes 1, 15-26

Etre Douze : l’élection de Matthias

Par un collectif de biblistes

CE 21, p. 22s

 

          Au soir de l’Ascension du Seigneur, les disciples, assidus à la prière, sont réunis au Cénacle, à la chambre haute, dans l’attente de l’Esprit-Saint promis.

          Jésus avait choisi douze disciples pour être avec lui (Marc 3,14) ; à la fin des temps ces Douze siègeraient avec le Fils de l’homme pour juger les douze tribus d’Israël (Matthieu 19,28). Cette volonté des premiers disciples d’être douze manifeste la conscience que les apôtres ont d’être le véritable peuple de Dieu, l’Israël nouveau. Avant de manifester une certaine rupture avec Israël, les chrétiens veulent d’abord exprimer la continuité : c’est le dessein de Dieu qui s’accomplit en eux. L’Eglise de Jésus-Christ est nouvelle ; elle naît, vieille de traditions, et héritière de la promesse faite à Abraham et aux pères.

          Cette appartenance à une tradition s’exprime dans le mode d’élection de Matthias : il semble bien que l’on reprenne ici un rituel juif d’élection communautaire, avec ses trois éléments typiquement juifs : appel à l’Ecriture, un commentaire actualisant, et la prière. Un aspect de rupture apparaît nettement : la prière s’adresse maintenant au Seigneur, c’est-à-dire à Jésus glorifié ; qui plus est, les Douze ne sont pas choisis en fonction de leur appartenance à telle tribu, mais en fonction de leur choix par Jésus.

          Pierre est celui qui manifeste la première initiative des Actes des Apôtres : c’est lui reconnaître une place et un rôle particuliers. Il cherche quelqu’un qui, dit-il, nous a accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a marché à notre tête, à commencer par le baptême de Jean jusqu’au jour où il nous été enlevé. Mais cela ne suffit pas pour être témoin de la Résurrection. Il faut encore un choix de Jésus lui-même permettant de témoigner de la signification de l’événement dans le présent de l’Eglise et agrégeant à un corps de témoins. Luc termine son récit par ces mots : Matthias fut adjoint aux onze apôtres.

          L’Eglise ainsi est constituée, rassemblée par Jésus-Christ : le corps apostolique est au complet signifiant qu’elle est le véritable peuple de Dieu. Elle est dans l’attente et dure dans la prière. Il ne lui manque plus que la vie : celle-ci va l’envahir par la venue de l’Esprit-Saint.

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Lundi de la 7ème semaine du Temps Pascal

Actes 25, 1-27

L’Esprit dans l’approfondissement postpascal des évangiles

Père Yves-Marie Congar

Je crois en l’Esprit-Saint, Tome I, p. 87s

 

          Le temps de l’Eglise est essentiellement celui de la mission, du témoignage et du kérygme. Il est remarquable que tous les évangiles s’achèvent par un envoi des apôtres en mission, avec, chez Luc et Jean, un don de l’Esprit-Saint. Chez Jean, l’Esprit est essentiellement Esprit de vérité, et, comme tel, il témoigne du Christ, conjointement avec les apôtres. Tandis qu’ils accompagnaient Jésus, le voyaient, l’entendaient, les disciples ont mêlé la foi et le manque de foi. L’Esprit fera remonter dans leur souvenir les enseignements de Jésus, et mûrira en eux un témoignage qui ne sera pas simplement répétition des faits en leur matérialité, mais intelligence et communication de leur sens. Jean reconnaît n’avoir compris qu’après le départ de Jésus le sens de ses gestes et de ses paroles ; tout son évangile illustre cet approfondissement postpascal. Il ne s’agit pas d’autre chose que de la plénitude du mystère chrétien et de l’économie salutaire issue de la vie et de la Pâque du Christ. Ce qui doit venir exprime simplement le rappel de ce que Jésus a dit s’accompagne du déploiement, dans l’inédit de l’histoire, de réponses nouvelles. L’Esprit pousse la réalisation du mystère chrétien en avant dans l’histoire des hommes. Cela convient bien à la nature du témoignage selon l’Ecriture.

          Tous les fidèles sont concernés. Jean leur écrit : Vous possédez une onction, reçue du Saint ; et tous, vous savez. Pour lui, l’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, cette onction vous enseigne sur tout (1 Jean 2,20 et 27). D’après le contexte, cette onction est reçue du Christ, et elle consiste en la parole de Jésus assimilée dans la foi sous l’action de l’Esprit. L’Esprit ne se révèle pas lui-même, il apparaît tout relatif à Jésus, communiqué par lui, et intervient auprès des Eglises, de l’Eglise, pour les avertir, les ramener dans le vrai. En elles, il est sans cesse une inspiration de Jésus, une aspiration vers le Seigneur Jésus : L’Esprit et l’Epouse disent : Viens ! (Apocalypse 22,17).

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3° lecture Dimanche de la 7ème semaine du Temps Pascal – B

Jean 17, 11b-19

« Afin qu’ils soient eux aussi sanctifiés dans la vérité »

Saint Augustin

Traité 108 sur l’évangile de saint Jean, OC 10, p. 364s

 

          La prière du Sauveur se poursuit avec pour objet les apôtres : Comme du fait que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. Quels sont ceux qu’il a envoyés ? Ses apôtres. En effet, le mot apôtre signifie envoyé. Dieu a donc envoyé son Fils non pas dans la chair du péché, mais dans la ressemblance de la chair du péché (Romains 8,3), et son Fils a envoyé ceux qui étaient nés dans la chair du péché et qu’il a purifiés de la tache du péché.

          Mais par là même que Jésus-Christ homme, médiateur de Dieu et des hommes (1 Timothée 2,5), est devenu le chef de l’Eglise, ses disciples sont ses membres, et c’est pour cela qu’il ajoute : Pour eux, je me sanctifie moi-même. Qu’est-ce à dire ? Je les sanctifie en moi-même, puisqu’ils sont eux-mêmes ce que je suis. En effet, ceux dont il parle ici sont ses membres : la tête avec le corps ne font qu’un seul Christ. C’est la doctrine de Paul quand il parle de la descendance d’Abraham : Si vous appartenez au Christ, c’est donc que vous êtes la descendance d’Abraham, après avoir fait précédemment cette observation : C’est à Abraham que les promesses ont été faites et à sa descendance. Il n’est pas dit : et aux descendances, comme s’il s’agissait de plusieurs, mais c’est d’une seule qu’il s’agit : à sa descendance, c’est-à-dire Christ. Si donc ici la descendance d’Abraham, c’est Jésus-Christ, que signifient ces paroles que Paul adresse aux fidèles : Je trouve maintenant ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et ce qui manque aux détresses du Christ, je l’achève dans ma chair en faveur de son corps qui est l’Eglise (Colossiens 1,24). Il ne dit pas : A mes souffrances, mais aux souffrances de Jésus-Christ, parce qu’il était membre de Jésus-Christ. Et dans les persécutions dont il était l’objet, il accomplissait dans son corps et pour sa part les souffrances que Jésus-Christ devait endurer dans son corps tout entier. Nous trouvons ici même une preuve de cette vérité dans la suite des paroles du Sauveur, car après avoir dit : Je me sanctifie moi-même pour eux, pour nous faire comprendre que le sens de ces paroles est qu’il les sanctifie en lui-même, il ajoute : Afin qu’ils soient eux aussi sanctifiés dans la vérité, c’est-à-dire nécessairement en moi, puisque la vérité est le Verbe qui était au commencement. C’est dans ce Verbe que le Fils de l’homme a été sanctifié dès le commencement de son existence, lorsque le Verbe s’est fait chair.

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2° lecture Dimanche de la 7ème semaine du Temps Pascal

Actes 24, 1- 27

Le don de l’Esprit

Père Yves-Marie Congar

Je crois en l’Esprit-Saint, Tome I, p. 71s

 

          Le rôle de l’Esprit, d’après les Actes des Apôtres, est d’actualiser et de répandre le salut, acquis dans et par le Christ, par le témoignage. Toujours le salut est attribué au Christ. Il est communiqué au nom du Christ, c’est-à-dire par sa vertu : c’est lui qui opère. L’Esprit anime ses disciples pour l’annoncer. Il guide leur témoignage jusque dans le détail de leurs démarches et itinéraires. Les Actes voient l’action salvifique du Christ comme se poursuivant constamment dans les communautés.

          L’Esprit intervient à chaque moment décisif de la réalisation du dessein salutaire de Dieu. La Pentecôte n’a pas suffi à donner, d’un seul coup, aux apôtres, l’intelligence de l’universalité de l’appel à la foi. Il y a fallu du temps et de nouvelles interventions. Il y a une histoire des venues de l’Esprit. C’est assez exactement en consonance avec son plan que saint Luc place des sortes de Pentecôtes successives : à Jérusalem, en Samarie, celle qui lance l’aventure missionnaire avec Corneille et l’événement de Césarée, et même l’épisode d’Ephèse. A chacun de ces grands moments un signe de l’intervention de l’Esprit est donné : exprimer en langues une louange de Dieu et prophétiser.

          Jésus avait annoncé cette venue de l’Esprit comme le don d’une puissance qui ferait des témoins pleins d’assurance, comme un baptême, non dans l’eau, mais dans l’Esprit-Saint. Les Douze eux-mêmes et les 120 disciples mentionnés par Luc semblent n’avoir jamais reçu le baptême d’eau, sauf peut-être celui de Jean Baptiste. Ils ont été comme plongés dans l’Esprit qui est venu sur eux. Ils ont dès lors pratiqué un baptême d’eau au nom de Jésus, c’est-à-dire en référence, par la foi, à sa Pâque salvatrice et à sa puissance de Seigneur : baptême accompagné du don de l’Esprit. Tous les textes témoignent du lien entre les deux. Sauf dans le cas de Corneille, où l’Esprit a une initiative absolue, le don de l’Esprit suit le baptême d’eau, sans que le rite baptismal apparaisse comme le moyen, disons la cause instrumentale,  immédiat de ce don. Parfois, c’est un autre rite qui en est l’instrument, à savoir, l’imposition des mains apostoliques.

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Samedi de la 6ème semaine du Temps Pascal

Actes 23, 12-35

L’Esprit principe vivifiant la Foi et l’Eglise

Saint Irénée

Contre les Hérésies, III, 24, 1, p. 394s

 

          La prédication de l’Eglise présente à tous égards une inébranlable solidité, demeure identique à elle-même et bénéficie du témoignage des prophètes, des apôtres et de tous leurs disciples, témoignage qui englobe le commencement, le milieu et la fin, bref la totalité de l’ économie de Dieu et de son opération infailliblement ordonnée au salut de l’homme et fondant notre foi. Dès lors, cette foi, que nous avons reçue de l’Eglise, nous la gardons avec soin, car sans cesse, sous l’action de l’Esprit de Dieu, telle un dépôt de grand prix renfermé dans un vase excellent, elle rajeunit et fait rajeunir le vase même qu’elle contient.

          C’est à l’Eglise elle-même, en effet, qu’a été confié le Don de Dieu, comme l’avait été le souffle à l’ouvrage modelé, afin que tous les membres puissent y avoir part et être par là vivifiés ; c’est en elle qu’a été déposée la communion avec le Christ, c’est-à-dire l’Esprit-Saint, arrhes de l’incorruptibilité, confirmation de notre foi et échelle de notre ascension vers Dieu, car dans l’Eglise, est-il dit, Dieu a placé des apôtres, des prophètes, des docteurs, et tout le reste de l’opération de l’Esprit. De cet Esprit, s’excluent tous ceux qui, refusant d’accourir à l’Eglise, se privent eux-mêmes de la vie par leurs doctrines fausses et de leurs actions dépravées. Car là où est l’Eglise, là aussi est l’Esprit de Dieu ; et là où est l’Esprit de Dieu, là est l’Eglise et toute grâce. Et l’Esprit est Vérité. C’est pourquoi ceux qui s’excluent de lui ne se nourrissent pas non plus aux mamelles de leur Mère en vue de la vie ils se creusent des citernes crevassées, faites de trous de terre et boivent l’eau fétide d’un bourbier : ils fuient la foi de l’Eglise de crainte d’être démasqués, et ils rejettent l’Esprit pour n’être pas instruits. Devenus étrangers à la vérité, il est fatal qu’ils roulent dans toute erreur et soient ballotés par elle, qu’ils pensent diversement sur les mêmes sujets suivant les moments et n’aient jamais de doctriné fermement établie, puisqu’ils veulent être sophistes de mots plutôt que disciples de la vérité. Car ils ne sont pas fondés sur le Roc unique, mais sur le sable, un sable qui renferme des pierres multiples.

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Vendredi de la 6ème semaine du Temps Pascal

Actes 22,22 – 23,11

L’Esprit-Saint dans les Actes des Apôtres

Père Yves-Marie Congar

Je crois en l’Esprit-Saint, tome I, p. 69s

 

          Pour les Actes des Apôtres, le Saint-Esprit est essentiellement le principe dynamique du témoignage qui assure l’expansion de l’Eglise. Pour cela, il fait irruption à la Pentecôte. Il y a certainement eu alors un commencement. Saint Luc en a construit le récit en assumant une tradition qui avait interprété l’événement en référence à des valeurs vécues dans la fête juive de Pentecôte : fête de la moisson dont les prémices avaient été offertes le lendemain  de la Pâque, ce qui unissait les deux fêtes, fêtes du don de la Loi. Ce que nous a appris Qumrân, ce que nous connaissons des lectures en usage dans la liturgie juive de la fête, les textes des Jubilés et de Philon : tout cela donne une base au thème de la Pentecôte, fête du don de la Loi au Sinaï, et permet de faire des rapprochements significatifs. Les tables de la Loi avaient été écrites par le doigt de Dieu (Exode 31,18) : c’était désormais le Saint-Esprit (Luc 11,20).

          Ainsi, de même que le Nouveau Testament n’est autre que Jésus-Christ, ouvert à toutes les nations, la Loi nouvelle n’est autre que l’Esprit rendant témoignage à Jésus pour et en tous les peuples. Le signe des langues prophétise la catholicité du témoignage. Les apôtres parlent la langue d’autres peuples, ils annoncent dans ces langues les merveilles de Dieu. Les Pères, mais aussi les exégètes et sans doute saint Luc lui-même ont vu dans ce miracle de l’Esprit l’inversion de la dispersion de Babel (Genèse 11,1-9). Il ne s’agit pas seulement d’un fait d’extension, d’universalisation. Le propre de l’Esprit est, demeurant unique et identique, d’être en tous sans déflorer l’originalité, ni les personnes, ni les peuples, de leur génie, de leur culture, et de faire ainsi que chacun exprime dans sa langue les merveilles de Dieu.

          La Pentecôte a été célébrée, au début, par les chrétiens, simplement comme le terme d’une Pâque de cinquante jours. On prenait le mystère pascal comme un tout : résurrection, glorification, c’est-à-dire Ascension, vie de fils de Dieu communiquée par le Seigneur en envoyant son Esprit.